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Les Amériques du 22 novembre au 16 janvier 1999


Une crise annoncée ...

Après le Mexique en 1994, la Thaïlande en 1997 et la Russie en 1998, c’est au tour du Brésil de jeter l’éponge devant les poussées spéculatives et, après avoir tenté en vain de "battre le marché" par une dévaluation contrôlée, de laisser flotter sa monnaie, le real. Enclenchée par la démission du président de la Banque centrale du Brésil, Gustavo Franco, et la décision prise, le 13 janvier, par les autorités monétaires de dévaluer de facto de 8 % environ le real, la crise monétaire vient ainsi, deux jours plus tard, de franchir une nouvelle étape.

Symbole d’une stabilité monétaire retrouvée, le real est arrimé au dollar à l’intérieur d’une bande ajustable depuis juillet 1994. La décision des autorités monétaires d’élargir la bande de fluctuation de la monnaie, qui était de 1,12 -1,22 reals pour un dollar à 1,20 -1,32, pour finalement la laisser flotter le 15 janvier (le taux de change est immédiatement passé à 1,60 réals pour un dollar avant de revenir à 1,50) vient donc dans les faits consacrer l’échec d’une politique monétaire qui, par sa rigueur, a eu pour effet à la longue d’entraîner la surévaluation du real, de l’ordre de 25 %, et de forcer les autorités à devoir maintenir les taux d’intérêt à des niveaux particulièrement prohibitifs pour l’économie, de l’ordre de 30 % en termes réels au moment de la dévaluation, pour tenter d’enrayer les sorties de capitaux, de plus en plus importantes depuis le moratoire sur la dette russe en août dernier. L’ajustement monétaire de 8 %, le 13 janvier, et les déclarations qui ont suivi, tant du nouveau président de la banque centrale, Francisco Lopes, que du ministre des Finances, Pedro Malan, à l’effet que le real devrait "glisser" de 15 % par rapport au dollar d’ici la fin de l’année, ce qui aurait ramené le real à sa valeur réelle, n’ont donc trompé personne. Ni les investisseurs, qui se sont empressés de sortir leurs capitaux et de jouer le real à la baisse ; ni le FMI, averti de la dévaluation au dernier moment, qui a immédiatement vu dans cette décision le signal d’un relâchement de la politique monétaire. L’onde de choc sur les marchés cambiaires et boursiers internationaux a été immédiate, et tout comme ce fut le cas pour le Mexique, la Thaïlande et la Russie, ce n’était plus qu’une question de temps avant que le real ne décroche. À un autre niveau, force est de constater qu’en dépit des propos rassurants des États-Unis et de l’aide préventive importante apportée par la communauté internationale au Brésil en novembre dernier, la crise financière qui ébranle les économies dites émergentes depuis 5 ans est non seulement loin d’être terminée (comme le montre la défiance grandissante des investisseurs à l’égard de la Chine depuis la faillite de GITIC), mais aussi que les coûts de sa gestion commencent à être de plus en plus lourds à supporter, sur le plan social dans les économies concernées mais aussi sur le plan financier dans la mesure où des sommes considérables doivent être mobilisées pour tenter, le plus souvent en vain, d’enrayer les mouvements spéculatifs. Enfin, et c’est un autre aspect de cette nouvelle crise monétaire, si, dans le cas présent, la crise trouve d’abord et avant tout son origine dans la crise profonde des finances publiques que traverse le Brésil, le déficit budgétaire atteignant près de 8 % du PIB en 1998, elle montre une nouvelle fois que, dans un contexte où les marchés sont devenus plus ouverts et les économies plus interdépendantes que jamais, du moins au niveau régional, les risques de contagion sont très grands, et que tout comme ce fut le cas pour le Mexique en 1994-1995, ce ne sont pas seulement les autres économies de l’Amérique latine, à commencer par l’Argentine et le Mexique, qui risquent d’être à leur tour rapidement affectées par la perte de confiance des investisseurs, mais également, et, en première ligne, les États-Unis eux-mêmes.

(Suite dans le document joint)

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