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IBC-CBERA

C’est en 1982 que les États-Unis proposèrent aux pays du Bassin des Caraïbes une initiative particulière en leur faveur. Ce programme commercial préférentiel, communément appelé IBC, sera régi par la loi de 1983 sur le redressement économique du Bassin des Caraïbes (Caribbean Basin Economic Recovery Act, CBERA). Le CBERA sera renouvelé en 1990 et renommé Caribbean Basin Economic Recovery Expansion Act, CBEREA. Le programme IBC deviendra dès lors permanent et plusieurs changements seront apportés pour faciliter l’accès des produits au marché américain. La loi de 2000 sur le commerce et le développement (Trade and Development Act, TDA) va introduire un nouveau programme, dit de partenariat, régi par la loi sur la promotion du commerce dans le bassin des Caraïbes (Caribbean Basin Trade Partnership Act, CBTPA). À la différence du CBERA, qui est une loi permanente, le CBTPA n’est en vigueur que jusqu’à septembre 2008.

24 pays bénéficient de ce programme : Antigua et Barbuda, Aruba, les Bahamas, la Barbade, Belize, les Îles Vierges britanniques, le Costa Rica, la Dominique, la République dominicaine, El Salvador, Grenade, le Guatemala, la Guyana, Haïti, le Honduras, la Jamaïque, Montserrat, les Antilles néerlandaises, le Nicaragua, le Panama, St. Kitts et Nevis, St. Lucie, St. Vincent et Grenadines, Trinidad et Tobago.

Contexte}

Destinée à soutenir l’économie d’une région qui compte quelques-uns des pays les plus petits et les plus pauvres de la planète, l’Initiative du bassin des Caraïbes (IBC) ressemble à bien des égards au Système généralisé des préférences (SGP). Son premier objectif est d’aider les pays à développer leurs capacités à l’exportation en leur procurant un accès préférentiel au marché américain, car la région est à la fois très proche et très dépendante des États-Unis. Plusieurs pays sont des paradis fiscaux et les zones franches sont non seulement très nombreuses, mais aussi en concurrence les unes vis-à-vis des autres. À ce titre, la diversification économique des pays bénéficiaires et le développement du secteur privé sont les principales finalités du programme.

Le CBERA est assorti de conditions à caractère économique relativement fortes. L’objectif est d’ancrer l’économie de marché dans la région et de renforcer ses institutions, notamment en ce qui a trait à la protection des droits économiques de l’investisseur et de l’inventeur. Le deuxième grand objectif se situe sur le plan politique. La région a toujours été considérée par les États-Unis comme une région instable. Ce partenariat privilégié a aussi pour mission de d’éliminer les menaces politiques (régimes hostiles, immigration clandestine) et économiques (trafic des narcotiques) à la sécurité nationale des États-Unis. Ensuite, le programme doit être replacé dans le cadre particulier des Amériques. Ce programme marque un tournant dans la manière pour les États-Unis d’aborder les relations avec le reste du continent. En particulier, par l’emphase mise sur le marché, la démocratie et l’initiative privée, il augure d’une autre initiative, beaucoup plus ambitieuse : l’initiative en faveur des Amériques (Enterprise for the Americas Initiative) qui sera lancée par le président Bush en juin 1990.

La clause sociale du CBERA

C’est lors de l’élaboration la Loi sur le redressement économique du Bassin des Caraïbes (CBERA) de 1983 que vont apparaître les premières mentions du respect des normes du travail dans les critères d’éligibilité aux programmes commerciaux préférentiels. La formulation de la clause sociale reste cependant vague. Le Président des États-Unis doit juger du « degré auquel les travailleurs dans ce pays se voient offrir des condition de travail raisonnables et bénéficient du droits de s’organiser et de négocier collectivement ». Il n’était fait aucune référence aux normes internationales du travail. Peu de poursuites étaient envisageables à cause de la faiblesse du vocable utilisé, et ce, d’autant plus que le mécanisme de contrôle des pays signataires était peu développé. Étant donné que c’était le premier accord américain liant travail et commerce, le groupe interministériel chargé d’établir les critères d’acception des pays bénéficiaires a dû innover. Le processus d’accréditation de pays passait par une étude de terrain (enquêtes et entrevues) par des acteurs gouvernementaux et de la société civile américains afin de juger de la force de l’application des lois relatives au travail. En plus de cela, l’ensemble des rapports officiels relatifs à la question était étudié afin de juger de la bonne conduite de pays en la matière. Les rapports dressaient l’état de lieux des conditions de travail et proposaient des réformes. Le pays devait, ensuite, rédiger une lettre d’intention notifiant les réformes institutionnelles envisagées. Une fois le pays accepté dans le programme, il y avait peu de chance qu’il en soit exclu. L’octroi du statut de bénéficiaire reposait sur des critères discrétionnaires et une fois ce statut obtenu, peu de pressions ont été exercées sur les pays pour qu’ils améliorent les normes du travail. En plus de cela, aucun mécanisme de pétition de droits n’était prévu dans cet accord.

La loi de 1990 va intégrer les dispositions du SGP en maitère de normes du travail. Elle exige dorénavant que le président prenne en compte les démarches du pays en lien avec les droits du travailleur internationalement reconnus. Le CBTPA de 2000 élargit davantage encore les préférences commerciales ; par contre, il introduit de nouvelles exigences, dans le domaine de la lutte contre la drogue et de la protection des droits de propriété intellectuelle par exemple, mais également dans celui des normes du travail. Dans ce domaine, la loi exige que le gouvernement américain « évalue jusqu’à quel point (in extent to which) le pays assure le respect des droits du travailleur internationalement reconnus ». Ce vocabulaire se veut plus contraignant et implique un examen précis de l’amélioration des conditions de travail dans les pays bénéficiaires. Aucune procédure de pétition de droits n’a été mise en place au titre de cette loi. Les groupes sociaux sont obligés d’avoir recours à deux autres mécanismes pour faire pression sur les pays bénéficiaires, celui du SGP ou faire pression lors des auditions publiques précédant le renouvellement du programme.
Jusqu’à aujourd’hui, les 24 pays bénéficiaires ont fait l’objet d’un examen portant sur le respect des normes du travail. Quatre pays ont un accès conditionnel à l’amélioration des normes du travail. Les pressions exercées pour non respect des normes du travail ont été assez faibles dans ce programme. L’absence de mécanisme de droit de pétitions explique cet état de fait.

Débats et mise en perspective

Le programme IBC couvre moins de 30 % des importations totales des pays de la zone. En tenant compte des importations SGP et des importations qui entrent en franchise de douane en vertu des accords de l’OMC, un peu plus des deux tiers des importations en provenance de la zone IBC entrent aux États-Unis soit en franchise de douane, soit à des tarifs préférentiels. Cependant, tout comme le SGP, le programme IBC ne touche qu’une très faible part du commerce des États-Unis. En 2004, les importations en provenance de la zone IBC représentaient 1,9% des importations américaines (USTR ; 2005).

Quel avenir a le programme IBC ? En introduisant en 2000 un programme de partenariat commercial, les États-Unis avaient en vue de faire avancer du bas vers le haut leur projet de zone de libre-échange des Amériques. Les négociations sont interrompues depuis 2005 et le projet est à l’article de la mort. Par contre, ils ont signé plusieurs accords bilatéraux de libre-échange, en particulier avec les cinq pays d’Amérique centrale et la République dominicaine (ALEAC-RD). Tout comme cela avait le cas pour le Mexique avec l’ALENA, les six pays de l’ALEAC-RD perdent automatiquement le bénéfice du « traitement spécial et différencié » et les privilèges liés au programme IBC. Les six pays de l’ALEAC-RD représentent les deux tiers des importations américaines en provenance de la zone IBC. Il en ira de même du Panama avec lequel les États-Unis sont parvenus à un accord en décembre 2006.
Des pourparlers sont également en cours avec les autres pays des Caraïbes, ce qui donne à penser que le programme est voué à disparaître progressivement au profit d’accords de libre-échange, sauf peut-être dans le cas d’Haïti. Ce pays bénéficie depuis décembre 2006 d’un programme spécifique (Haitian Hemispheric Opportunity through Partnership Encouragement (HOPE) Act) ; ce programme élargit les avantages commerciaux et reprend les mêmes critères d’attribution que l’AGOA.

Références

Gouvernance Globale du Travail (GGT) ggt @uqam.ca Plan du site Haut Haut
Université du Québec à Montréal (UQAM)    Institut d'études internationales de Montréal (IEIM)    Centre d'études sur l'intégration et la mondialisation (CEIM)    CANADA    Ressources humaines et Développement social Canada    Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM)