Dire l’économicisation des relations internationales, c’est dire la pollution des théories en relations internationales par les différents paradigmes économiques. C’est aussi dire l’importance des rapports économiques comme déterminants des théories des relations internationales a déjà été bien rendu par des auteurs aussi respectés que C. Fred Bergsten.[1]
À la suite de notre lecture de The Logic of Anarchy (LoA)[2], le terme de pollution nous a semblé particulièrement approprié. Pollution, donc, parce que, avec la lecture de Theory of International Politics (TIP)[3] que nous proposent Buzan, Jones et Little, il ressort que l’approche néoréaliste des relations internationales, plus précisément celle de Kenneth Waltz, reposerait sur des fondements, une métaphore, micro-économiques qui limitent les analyses ou qui présentent certaines incohérences.
L’ambition première des auteurs qui nous intéressent ici n’est pas de réfuter l’approche néoraliste, ils visent plutôt à la compléter, à l’approfondir. Sur le thème de l’économicisation des théories des relations internationales, c’est donc dire que les auteurs relèvent l’invitation qui avait été lancée par Waltz lui-même il y a quelques années.[4] D’entrée de jeu, on reconnaîtra qu’une démarche qui vise à la fois à dépasser l’économicisme de l’approche néoréaliste et à inclure les paramètres et les données économiques dans l’analyse des rapports internationaux peut difficilement être sans poser une tension fondamentale. Une telle démarche soulève en effet la question de savoir si il est possible de transcender l’économicisme de Waltz, que l’on trouve par exemple dans ses conceptions d’agents rationnels et de la formation des systèmes internationaux comme des structures de marché, et Principalement, notre propos ici est de discuter et de critiquer les thèses et les remarques posées par les auteurs de LoA. Mais puisque leur ambition est précisément de critiquer et de dépasser les paramètres simplistes du néoréalisme qui, il est vrai, reposent largement sur des hypothèses microéconomiques, et, ensuite, de proposer un nouveau structuralisme en théories de relations internationales ; notre propos portera donc à deux niveaux. Premièrement, sur l’oeuvre qui nous intéresse plus particulièrement, notre commentaire ne portera pas tant sur les critiques épistémologiques faites par Buzan, Jones et Little que sur leur compréhension des rapports économicistes posés par Waltz. Deuxièmement, en nous tenant au thème de l’économicisation des relations internationales, nous verrons que le structuralisme des auteurs aurait gagné à mieux saisir la dimension proprement structuraliste du marché et, qu’en fait, ces auteurs ne parviennent pas à se dégager d’une économicisation des théories des relations internationales qui est précisément reprochée à Waltz.d’intégrer les nouveaux agents et déterminants économiques sans faire dans l’économicisme qui est reproché à Waltz. Les auteurs parviennent-ils à réussir cette prouesse théorique ? Non.
(Suite dans le document joint)