Résumé
Cet article soulève deux dimensions particulières. D’abord, il pose la question du poids de l’héritage conflictuel dans les politiques turques mises en oeuvre vis-à-vis Moscou. Dans quelle mesure cet héritage marque-t-il après la fin de la Guerre froide les positions du régime du Président Erdogan et la dynamique sous-jacente aux relations turco-russes ? Ensuite, comment cette relation bilatérale est-elle affectée et remodelée par les changements de nature du système des relations internationales et la géopolitique régionale ?
Cet article démontre qu’aujourd’hui, avec les nouveaux conflits apparaissant dans son voisinage immédiat, la Turquie s’est déjà mise en quête de soutiens substitutifs à l’Occident. Un rapprochement d’Ankara avec ses voisins régionaux s’impose d’autant plus que la zone européenne traverse de fortes turbulences et que l’horizon d’une intégration de la Turquie à l’Union reste profondément obstrué particulièrement au vu de l’affaire des réfugiés et migrants. Le monde musulman arabe (et iranien) agit ainsi de plus en plus sur Ankara dans l’équilibre de ses relations avec Moscou. Les liens complexes entre ces principaux centres d’influence que sont les États-Unis, l’UE, la Russie, la Turquie, sans parler de l’Iran, sont appelés à remodeler fortement les arrangements de sécurité et de stabilité de l’ensemble de la région.